Franck Montaugé

Sénateur du Gers

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Archives pour mars 2020

Entreprises et Covid-19: Franck Montaugé pose une question écrite au Gouvernement

Publié le 30 mars 2020

Le sénateur du Gers Franck Montaugé adresse ce jour une question écrite au Gouvernement concernant la situation préoccupante des entreprises commerciales, artisanales et industrielles face à la crise du Coronavirus. 

La pandémie du coronavirus (SRAS-CO-V-2) confronte la nation française à une situation inédite où des centaines de milliers de commerces et d’entreprises artisanales ou industrielles se retrouvent en danger de disparition du fait des obligations édictées par l’État de cessation totale ou partielle d’activité nécessaire à l’arrêt de la propagation virale. 

Le code des assurances actuel permet de couvrir les locaux, le matériel, les machines en lien avec les risques stipulés au contrat. Il permet aussi de couvrir la perte d’exploitation engendré par les dommages constatés. Les pandémies sont à ce jour exclues de ces risques.

Dans le cas de la pandémie que subit aujourd’hui notre économie, les pertes d’exploitation ont le caractère de « pertes sans dommage » et il n’est pas certain qu’elles puissent être assurées, même dans le cadre de la promulgation d’un état de catastrophe naturelle. 

Toutefois, compte tenu de l’urgence à prendre en compte la situation des entreprises en difficulté, il parait indispensable que le champ de la garantie soit légalement étendu aux fonds de commerce et aux fonds artisanaux et que les acteurs de l’assurance soient parties prenantes du redressement de l’économie du pays. 

Franck Montaugé demande au Gouvernement quelles mesures à caractère législatif ou règlementaire il entend engager ou prendre pour que le droit des assurances permette la couverture des pertes d’exploitation et des fonds de commerce ou artisanaux, avec effet rétroactif à la date au plus tard du premier jour de confinement, le 17 mars 2020.


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Économie des territoires et Covid-19 : la commission des affaires économiques au travail

Publié le 28 mars 2020

Pour la première fois depuis le vote des lois instaurant l’état d’urgence sanitaire et la publication des ordonnances et décrets pris par le Gouvernement qui en résultent, la commission des affaires économiques s’est réunie hier matin en vidéo – conférence pour faire le point des difficultés constatées sur les territoires. Sur la base des remarques et analyses exprimées par les sénateurs, la présidente de la commission Mme Sophie Primas a interpelé par courrier les ministres de l’Economie (lire ici), de l’Agriculture (lire ici) et de la Transition écologique et solidaire (lire ici).

En substance, cinq points de vigilance ont été soulevés et :

  • 1: le dispositif d’activité partielle est encore insuffisamment clarifié et plusieurs dysfonctionnements sont à signaler, ce qui ajoute aux difficultés économiques une incertitude psychologique. En particulier :
    • certaines entreprises souhaitent pouvoir recourir à l’activité partielle bien qu’elles ne soient pas contraintes administrativement de fermer. D’une part, l’absence de commandes et l’approvisionnement défaillant réduisent considérablement leur chiffre d’affaires ou leur niveau de production ; d’autre part, certains (voire l’intégralité) des salariés ne souhaitent pas prendre de risque sanitaire en venant travailler. Dans ces conditions, il leur est inutile (voire dangereux) de rester ouvertes. C’est par exemple le cas de certains drives, de la restauration rapide, d’artisans du bâtiment, de pâtissiers, de traiteurs, etc. Or les Direccte leur répondent qu’elles ne sont pas éligibles à l’activité partielle du fait que la fermeture n’est pas imposée ;
    • l’absence d’ouverture du chômage partiel aux auto-entrepreneurs a également été déplorée, en particulier s’agissant des travailleurs des plateformes ;
    • de nombreuses entreprises se heurtent à des difficultés techniques du fait que les plateformes sont saturées et ne permettent donc pas de procéder aux démarches administratives. Il faut parfois plus d’une semaine pour recevoir les codes nécessaires. C’est particulièrement anxiogène pour les chefs d’entreprise, a fortiori ceux de TPE-PME.
  • 2: les reports de charges fiscales et sociales ne suffiront pas et il faudrait en conséquence pour certains sénateurs privilégier l’annulation des charges. En effet, un report entraîne une sortie massive de trésorerie au moment de la reprise (charges en « retard » additionnées à celles contemporaines), c’est‑à‑dire quand celle-ci sera quasi‑inexistante ;
  • 3: le manque de main‑d’œuvre, lié au droit de retrait exercé par certains salariés en raison des craintes sanitaires, risque de considérablement limiter les ventes, au‑delà même du problème d’approvisionnement des produits. Les acteurs économiques s’interrogent par conséquent sur la livraison des masques : quelle sera la quantité, et selon quels critères seront‑ils distribués ?
  • 4: il est nécessaire de clarifier les modalités de mise en œuvre des différents dispositifs et d’harmoniser les pratiques des services déconcentrés de l’État. En matière de sécurité sanitaire et de précautions à mettre en œuvre sur les lieux de travail, les consignes restent trop hétérogènes. Cet état de fait entretient les réticences de certains employés à venir travailler (cfsupra) et met en danger la pérennité de la production. Le manque de masques disponibles oblige certaines entreprises à instaurer des mesures d’activité partielle, voire à fermer les sites ;
  • 5: il est impérieux de réfléchir dès maintenant à une stratégie de relance post-crise, se fondant notamment sur les PME. La perte de chiffre d’affaires et l’endettement pèseront nécessairement sur le financement des investissements et risquent donc de se traduire en une chute brutale du montant et du nombre des investissements.

Par domaine, les sénateurs en rapport avec les acteurs locaux ont fait remonter les informations suivantes :

Commerce, services, artisanat

  • une distorsion de concurrence naît entre les petits commerces et la grande distribution. Alors que les premiers, lorsqu’ils ne sont pas « essentiels » (librairie, fleuriste, textile), ont fermé, la seconde est toujours autorisée à ouvrir et donc à vendre, notamment, des livres, fleurs, habits. Il pourrait être envisagé une ouverture des grandes surfaces limitée aux rayons alimentaires et d’hygiène ou la mise en place d’organisations locales (plateformes numériques couplés à des drive ou de la livraison à domicile) permettant de restaurer l’équité entre acteurs économiques, aujourd’hui largement remise en cause. Le même constat peut être fait concernant les grandes plateformes de commerce en ligne ;
  • les acteurs manquent de visibilité sur les critères d’éligibilité au Fonds de soutien. Les critères aujourd’hui annoncés sont par ailleurs de nature à entraîner un non‑recours élevé. Le taux de 70 % est trop élevé, et la période de référence ne devrait pas être celle de mars 2019, puisque l’activité commerciale y était déjà en forte baisse (gilets jaunes) ;
  • certains secteurs, comme celui de la restauration, font déjà face à des difficultés très importantes de trésorerie: la baisse de fréquentation ayant commencé début mars (et non pas le 14 mars, date de l’arrêté d’interdiction), leur trésorerie ne leur permet pas de payer des salaires « entiers » jusqu’au 14 mars, puis d’avancer les indemnités de chômage partiel pour les deux semaines restantes ;
  • les artisans du bâtiment rencontrent des difficultés concrètes sur les chantiers pour concilier la poursuite de l’activité économique et le respect des règles sanitaires. Outre le manque de masques, il est par exemple financièrement impossible, pour se déplacer, d’utiliser plusieurs véhicules pour respecter la distance sociale d’un mètre ;
  • de fortes interrogations subsistent quant aux mesures de soutien pour le secteur de l’événementiel, qui subit un nombre très élevé d’annulations ;
  • la clarification annoncée par la secrétaire d’État concernant la possibilité pour les entreprises en sauvegarde de bénéficier de la garantie des prêts n’est toujours pas intervenue ;
  • des difficultés sont relevées en matière bancaire: agios élevés (à des taux d’intérêt qui frôleraient l’usure). Une cellule de suivi des difficultés entreprises‑banques pourrait être mise en place ;
  • l’on assiste à une augmentation des prix de certains produits de première nécessité, catégorie qui devrait par ailleurs être élargie dans le cadre de la crise actuelle pour prendre en compte les situations nouvelles (retour en France d’expatriés pour accompagner un proche souffrant, par exemple).

Tourisme

  • la situation est très difficile pour les entreprises du secteur, en particulier les hôtels, cafés et restaurants, les fermes et tables d’hôtes confrontés à des annulations et qui risquent de ne pas disposer de la trésorerie suffisante pour survivre (lire ici) ;
  • la portée de l’ordonnance relative à la possibilité, pour les contrats touristiques, notamment d’hébergement, de reporter la prestation plutôt que de la rembourser afin de préserver la trésorerie des établissements, est très limitée pour les hôtels ayant recours à des plateformes de réservation, lesquelles ont souvent fait le choix, sans consulter les établissements concernés, de procéder à des remboursements, les privant ainsi de la trésorerie correspondante ;
  • cela relève une méconnaissance des modalités de fonctionnement du secteur.

Industrie

  • même dans les cas où les salariés sont volontaires pour venir travailler et disposent de protections suffisantes, l’approvisionnement en matières premières de pays touchés par la crise sanitaire se complique, pouvant pousser les entreprises industrielles à réduire ou cesser leur activité ; par exemple, une entreprise de filature de la région Nord a indiqué manquer de matière première provenant d’Inde, qui a stoppé toute sa production en raison des mesures de confinement récemment décidées.
  • la fermeture des frontières peut également remettre en cause les chaînes d’approvisionnement habituelles. Il s’agit d’un problème d’autant plus lourd, que les services déconcentrés de l’État (notamment les Direccte) ne considèreraient pas que le manque de matières premières suffise à justifier une réduction d’activité, et donc l’indemnisation des mesures d’activité partielle ;
  • dans le secteur de la mécanique et des machines, le manque de pièces détachées (dont l’import est bloqué ou dont la production a été stoppée) est un enjeu considérable, qui touche aussi plus largement la capacité nationale de lutte contre la crise sanitaire : la pénurie de pièces empêche les opérations de maintenance ou de remise en état des appareils, pouvant ainsi paralyser l’outil industriel ou les équipements dans le secteur des transports, de la santé, des communications.

Agroalimentaire

  • Au niveau de la production et de la logistique
  • grandes difficultés pour certaines productions agricoles
  • manque de main d’œuvre pour les produits saisonniers de fruits et légumes (fraises et asperges), avec une inquiétude liée au prolongement du confinement sur les cueillettes à venir comme les cerises ;
  • pic de produit de lait qui pèse déjà sur les cours. Malgré la reprise de l’export vers la Chine, les effets incertains sur l’export dans l’Union européenne et la fermeture de certains débouchés (RHF, fromages à la coupe, etc.) induisent des besoins de limitation de la production et de stockage qui doivent être soutenus par l’Union européenne et l’État ;
  • sans lien direct avec la crise du Covid, chute dramatique des cours du sucre et de l’éthanol en raison de la baisse des cours du pétrole qui va replonger la filière betteravière dans une crise dont elle était en train de sortir.
  • un risque sur les approvisionnements en machines agricoles et pièces détachées dans les exploitations, en raison de la fermeture de certains sites de production ;
  • des sites industriels agroalimentaires qui, s’ils sont toujours actifs aujourd’hui, sont au bord de la rupture en raison d’un taux d’absentéisme croissant (garde d’enfant, arrêt maladie, droit de retrait) et de difficultés à assurer le maintien de conditions sanitaires élevées pour les employés, d’autant que les blouses, charlottes et masques, dont l’approvisionnement devient impossible, sont sollicitées pour les personnels soignants) ;
  • des risques de rupture d’approvisionnement en emballage dans la mesure où ils sont dans leur grande majorité importés (alvéoles pour les cagettes de légumes, fils pour certains sacs contenant des aliments…). La grande distribution requiert désormais davantage de denrées préemballées alors que la loi économie circulaire a paradoxalement, il y a quelques mois, interdit à court terme tout emballage plastique;
  • une hausse des coûts du transport pour les industries alimentaires, difficilement transférables à l’aval, notamment en raison des retours de livraison à vide des transporteurs. L’État pourrait prendre en charge une partie de ce surcoût pour garantir les approvisionnements. Une autre solution serait d’assurer une gratuité des péages, qui bénéficierait à tous les acteurs des secteurs essentiels ; transporteurs, employés de l’alimentaire, mais aussi personnels soignants, tout en réduisant le coût des transports et en améliorant la fluidité des acheminements ;
  • ne pas repousser les télédéclarations PAC, le risque étant de repousser également les paiements. L’objectif serait plutôt de dématérialiser les aides et services proposés par les DDT aux agriculteurs pour les accompagner au mieux.

Au niveau de la distribution

  • difficultés d’écoulement de produits compte tenu de la fermeture de certains marchés (RHF, marchés de plein vent…)
  • grandes difficultés de la filière horticole dont certains producteurs réalisent 80 % de leur vente entre mars et avril – de nombreux producteurs n’ont d’autre choix que d’envoyer leur production au rebut sans solution d’indemnisation ;
  • risques de catastrophe économique pour la viande ovine et caprine dont les ventes sont concentrées en cette période de Pâques. La grande distribution pourrait privilégier la commercialisation d’agneaux néo‑zélandais ;
  • baisse très inquiétante de la vente de fromages sous AOP compte tenu de la fermeture des rayons « coupe » en GMS, du marché de la RHF et des marchés plein air. Cela se traduit par l’arrêt de la demande des laiteries qui préfèrent écouler leurs stocks.
  • ne pas pénaliser trop fortement les approvisionnements en circuits courts
  • l’interdiction des marchés en plein air dans certains départements soulève des difficultés majeures d’écoulementpour ces producteurs ; des solutions alternatives et qui pourraient après la crise se révéler durables sont à mettre en œuvre sous couvert des autorisations de l’Etat (plateforme numérique client – producteur local, drive ou/et livraison à domicile)
  • harmoniser les règles pour que la commercialisation de semences et plants pour les amateurs dans les jardineries soit autorisée partout;
  • En grandes surfaces, plusieurs inquiétudes se font jour : les distributeurs devraient privilégier les approvisionnements nationaux, une mesure qui si elle est difficile à imposer au niveau national, devrait être appliquée au plus vite au niveau local à l’échelle du chef de magasin ;

À plus long terme, la crise nous amène à nous interroger sur notre souveraineté et la résilience de l’ensemble de notre chaîne de production alimentaire. La dépendance accrue de notre modèle aux importations doit se réduire par une reconquête de parts de marchés de la production nationale dans les assiettes des consommateurs français. La crise peut accélérer le mouvement, comme c’est le cas actuellement pour la viande bovine, les ménages consommant davantage de viande en GMS ou en local, où elle est majoritairement française, n’en consommant plus en RHF, où elle est en grande majorité importée.

Énergie

  • On constate de lourdes difficultés liées à la chute du coût de l’énergie (pétrole, gaz et électricité) imputable pour partie à la crise du Covid-19 qui, de premier abord, semble positive pour le pouvoir d’achat des consommateurs d’énergie mais, en réalité, est désastreuse pour la rentabilité et in fine les investissements des fournisseurs ;
  • une baisse de la consommation des biocarburants en lien avec celle de la consommation de pétrole est également notable, la filière rencontrant des difficultés, notamment sur le plan de l’approvisionnement en matières premières et de la livraison des produits finis, mais étant en capacité de mettre à profit son savoir‑faire pour d’autres usages, à l’instar de la fabrication de gel hydroalcoolique par les producteurs de bioéthanol et de glycérine par ceux de biogazole ;
  • on relève enfin des problèmes de désorganisation, de livraison et de trésorerie dans le secteur du chauffage au bois.

Logement

  • les bailleurs sociaux risquent d’être confrontés à d’importantes difficultés financières si les impayés ou les retards techniques dans le paiement des loyers (en chèque ou espèces) devaient se multiplier ;
  • les offices publics de l’habitat demandent un moratoire sur la réforme du logement social (RLS) en cette période de crise, comme pour les autres réformes ;
  • il est souhaitable que la Banque des territoires soit à même de procéder, si nécessaire, à la suspension du remboursement des prêts ou d’apporter un appui en cas de problème de trésorerie avéré d’un bailleur ;
  • la reprise des chantiers de construction ou de rénovation est un enjeu important pour le secteur mais les bailleurs et maîtres d’ouvrage, sont confrontés à la difficulté de déterminer les responsabilités juridiques et sanitaires des différents acteurs dans l’arrêt ou la reprise des chantiers dans les circonstances actuelles.

La Poste

  • la décision prise par La Poste de ne procéder à la livraison de la presse que 3 jours par semaine a été critiquée comme unilatérale et préjudiciable aux personnes éloignées et comme constituant un manquement à sa mission de service public et d’intérêt général de transport et de distribution de la presse, qui est pourtant compensée par l’État, et donc par les contribuables (NB : La Poste estime cependant que cette activité est déficitaire à hauteur de 178 millions d’euros en 2018 après compensation de l’État).

Forêt

  • tous les travaux sylvicoles sont stoppés, ce qui pèsera sur l’approvisionnement de toute la filière aval (pour l’alimentation en bois des chaufferies, les températures actuelles, assez élevées, permettent de limiter les inconvénients). De façon générale, la crise est en train de se propager à l’ensemble du secteur forêt et bois.

Liens utiles relatifs aux mesures de soutien à l’activité économique :

Les mesures‑clefs du dispositif de soutien

Le dossier de presse « Fonds de solidarité : quelles démarches pour quelles entreprises ? » 

La « foire aux questions » du ministère de l’économie et des finances

Plan pour les start-ups

Le fonctionnement de la garantie des prêts par l’État

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Loi d’état d’urgence sanitaire: un accord Sénat – Assemblée nationale trouvé ce soir

Publié le 22 mars 2020

Députés et sénateurs ont trouvé “un accord” dimanche en début d’après-midi sur le projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de coronavirus. Le texte vient d’être validé par le Sénat (lire ici) et il le sera dans la soirée par l’Assemblée nationale. La loi va permettre d’instaurer immédiatement et pour deux mois l’état d’urgence sanitaire, encadrant la restriction des libertés publiques (confinement, réquisitions…). Elle autorise aussi le Gouvernement à prendre par ordonnances une série de mesures pour soutenir les différentes catégories d’entreprises.

Le second point de discussion concernait le deuxième tour des élections municipales, avec des désaccords autour de la date de dépôt des listes. L’accord trouvé prévoit que, si les conditions sanitaires le permettent, le décret de convocation des électeurs pour le second tour sera pris au plus tard le 27 mai. La date limite pour le dépôt des listes sera fixé au mardi suivant la convocation des électeurs, soit au plus tard le 2 juin.

Le calendrier électoral est désormais le suivant :
  • 10 mai :  rapport général état sanitaire de la France (avec avis du comité scientifique)
  • 23 mai :  rapport spécial pour la tenue du 2 ème tour (dernier délai)
  • 27 mai :  décret de convocation
  • 2 juin :    dépôt des listes, au plus tard
  • 8 juin :    début de la campagne de deuxième tour
  • 21 juin :  consultation deuxième tour
Les élections effectives dès le premier tour de scrutin sont définitivement acquises conformément à l’article 3 de de la Constitution de la Ve République (voir alinea 4 de l’article 11 ter du texte).

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Epidémie de Coronavirus: le point sur les dispositions votées par le Sénat

Publié le 20 mars 2020

Les sénateurs ont délibéré dans la nuit de jeudi à vendredi pour adopter des mesures relatives aux conséquences de l’épidémie de Coronavirus (consultez ici le texte voté). Ces décisions sont le fruit d’une première lecture. L’Assemblée nationale discute à son tour tous ces textes aujourd’hui (vendredi 20 mars). Une dernière lecture après “commission mixte paritaire” pourrait parachever l’adoption des mesures.

Dans une note adressée aux préfets, la ministre de la Cohésion des territoires précise que: “Le projet de loi d’urgence pour faire face à l’épidémie de covid-19 fixera les modalités de continuité des exécutifs locaux en maintenant en fonction les maires et adjoints en fonction au 15 mars jusqu’au 15 mai, date à laquelle le gouvernement remettra au Parlement un rapport, fondé sur une analyse du comité national scientifique ; le comité national scientifique se prononçant sur l’état de l’épidémie de covid-19 et sur les risques sanitaires attachés à la tenue du second tour et de la campagne le précédant, ainsi que sur la possibilité d’installer les conseils municipaux. Une fois les conditions sanitaires réunies, les conseils municipaux élus à l’issue du premier tour pourront être installés et élire leurs nouveaux exécutifs dans les délais les plus brefs”, précise la ministre.

Le projet de loi ordinaire discuté dans la nuit vise donc à :

  • organiser le report du second tour des élections municipales, communautaires, des conseillers de Paris et des conseillers métropolitains de Lyon ;
  • instaurer un dispositif d’état d’urgence sanitaire ;
  • prendre des mesures d’urgence économique et d’adaptation à la lutte contre l’épidémie.

Travail en commission :

 Sur le rapport de M. Philippe Bas , la commission des Lois a adopté des amendements sur le projet de loi tendant à :

  • fixer au mardi 24 mars 2020 (voir ci-dessous repoussé au 31 mars 2020 en séance mais contre l’avis du Gouvernement) la date limite de dépôt des candidatures pour le deuxième tour des élections municipales (amt COM-15– art. 1er) ;
  • fixer l’entrée en fonction des conseillers municipaux élus au premier tour au lendemain du second tour des élections (amts COM-16et COM-17 – art. 1er) ;
  • assurer la continuité du fonctionnement des établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre jusqu’au second tour des élections municipales (amt COM-6 rect.– art. 1er) ;
  • prévoir la possibilité de la tenue du second tour des élections municipales et communautaires en Polynésie française ou en Nouvelle-Calédonie à une date différente de celle prévue en métropole (amt COM-20– art. 1er) ;
  • aménager les conditions dans lesquelles les conseils municipaux élus au premier tour se réunissent pour l’élection du maire et de ses adjoints (amtCOM-21 rect.– art. add. après art. 1er) ;
  • maintenir les procurations déjà enregistrées pour les élections consulaires prévues les 16 et 17 mai 2020 (amt COM-2– art. 3) ;
  • préciser et clarifier le dispositif d’état d’urgence sanitaire (amt COM-29– art. 5) ;
  • fixer à deux mois la durée de l’état d’urgence sanitaire s’appliquant à la situation actuelle (amt COM-31– art. 5 bis) ;
  • rendre temporaires les dispositions concernant le dispositif d’état d’urgence sanitaire (amt COM-32– art. add. après art. 6) ;
  • réduire de la moitié au tiers des membres en exercice des assemblées délibérantes des collectivités territoriales et de leurs établissements publics le quorum qui y est applicable et permettre la détention de deux pouvoirs au lieu d’un pour chaque membre de ces assemblées, pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire (amt COM-61– art. add. avant art.  7) ;
  • prévoir l’autorisation de réunion des assemblées délibérantes et des organes exécutifs collégiaux des collectivités territoriales par téléconférence pendant la durée de l’état d’urgence sanitaire (amt COM-11– art. 7) ;
  • renforcer les pouvoirs de contrôle du Parlement dans le suivi et la mise en œuvre de la présente loi (amt COM-26 rect.– art add. après art. 11).

En séance publique : le débat en séance se fait sur le texte de la commission 

Sur le projet de loi, les sénateurs ont adopté des amendements tendant à :

  • reporter au 31 mars 2020 la date de dépôt des candidatures pour le deuxième tour des élections municipales (amt 5et ss-amt 111 – art. 1er) ;
  • reporter, pour les communes dont le conseil municipal a été élu au premier tour, l’élection des maires et des adjoints à une date fixée par décret, au plus tard au moins de juin (amt 93 rect.et ss-amt 108 – art. 1er) ;
  • étendre, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, les garanties assurées par l’établissement public de santé aux professionnels de santé y exerçant à titre bénévole (amt 24– art. 5) ;
  • permettre au Premier ministre, dans le cadre de l’état d’urgence sanitaire, de prendre les mesures temporaires de contrôle des prix rendues nécessaires pour prévenir ou corriger les tensions constatées sur le marché de certains produits, ainsi que toute autre mesure permettant la mise à disposition de médicaments appropriés pour l’éradication de l’épidémie (amt 90 du Gouvernement et sous-amt 100 au nom de la commission des lois) ;
  • conférer aux agents de police municipale, gardes-champêtres, agents de la ville de Paris chargés d’un service de police, contrôleurs de la préfecture de police et agents de surveillance de Paris la compétence pour constater les contraventions de violation des mesures prises dans le cadre de la crise sanitaire liée au Covid-19 (amt 63 rect– art. 5) ;
  • habiliter le Gouvernement à prendre par ordonnances les mesures d’adaptation destinées à adapter le dispositif de l’état d’urgence sanitaire dans les collectivités d’outre-mer et en Nouvelle-Calédonie (amt 64– art. add. après l’art. 5) ;
  • inclure les associations dans le champ d’application des ordonnances qui seront prises pour faire face aux conséquences économiques, financières et sociales dans le cadre de la crise sanitaire liés au Covid-19 (amt 66 rect.– art. 7) ;
  • adapter le régime social des indemnités d’activité partielle (amt 68– art. 7) ;
  • adapter les modalités de détermination des indemnités de chômage (amt 69– art. 7) ;
  • habiliter le Gouvernement à prendre par voie d’ordonnance toutes les dispositions utiles permettant de lever les freins législatifs et réglementaires susceptibles d’entraver la bonne marche des projets de recherche en cours visant à lutter contre la propagation de l’épidémie de Covid-19 (amt 72– art. 7).

Consultez ici le texte du projet de loi

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Les collectivités locales leviers de développement des territoires ruraux : un nécessaire changement de modèle national

Publié le 12 mars 2020

Dans le cadre des travaux de la délégation aux collectivité territoriales et à la décentralisation, le sénateur Montaugé, avec trois de ses collègues (MM. Delcros, Husson et Vall), a remis en janvier 2020 un rapport (lire ici) qui fait 33 recommandations au Gouvernement et à l’État pour faciliter le développement des territoires ruraux.

Les ruralités souffrent d’un puissant sentiment d’iniquité, fondé sur la perception d’une prise en compte insuffisante de leurs difficultés, mais aussi de leurs atouts, de la part des pouvoirs publics comme, plus largement, des observateurs.

Trop souvent braqué sur les métropoles, les banlieues et la vie urbaine, le regard des media et des institutions minimise l’importance de la ruralité. Le langage employé est trop souvent dépréciatif et ne valorise que rarement les apports des ruralités à la société. La statistique a longtemps fait de la ruralité un résidu univoque de l’urbanisation, et a choisi des modes d’appréhension qui ont fortement réduit la perception de sa dimension, conduisant à négliger le fait qu’elle concerne, en réalité, plus des deux tiers du territoire et un tiers de la population. (lire ici)

Une première étape dans la prise en considération de la réalité rurale est de la mesurer correctement en tenant compte, non seulement de sa démographie mais aussi de ses aménités, à savoir de tous les éléments qu’elle apporte à la communauté nationale, des paysages à l’agriculture, en passant par la production d’énergie décarbonée ou les ressources en eau, etc. (Recommandations 1 à 4).

Pour mémoire, le sénateur Montaugé plaide toujours et depuis des années la nécessité d’une loi de “reconnaissance et de développement des territoires ruraux » qui permettrait véritablement de changer de paradigme, avec responsabilité et pragmatisme, dans le cadre d’un débat national que les événements sociaux partis des territoires ruraux en 2018 n’ont fait que justifier.

Loin d‘une image de déclin, trop souvent véhiculée, la ruralité, au-delà de ses fragilités, est travaillée par de nombreuses dynamiques de développement économique, social ou culturel. Les collectivités locales sont pleinement engagées pour favoriser et encourager ces élans créatifs. Cela suppose que l’État central entende davantage les territoires ruraux en matière de conception générale de la politique d’aménagement du territoire, mais aussi en ce qui concerne la définition des instruments concrets de cette politique, au premier chef par la nouvelle Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT) (Recommandations 5 à 12).

De son côté, l’État territorial doit s’organiser pour être davantage « facilitateur ». Or, cet État territorial a été singulièrement fragilisé, depuis des années, par une série de réorganisations (RGPP, MAP, RéATE …), par des réductions drastiques et une véritable fuite de ses compétences. Pourtant, les élus et les territoires ruraux ont besoin d’un accompagnement des services déconcentrés de l’État. De nombreuses collectivités rurales éprouvent en effet un quadruple besoin : un besoin de dialogue stratégique organisé, un besoin de concertation simplifiée sur les projets, un besoin de financements adaptés et stables et un besoin de compétences d’ingénierie.

Par ailleurs, pour certains territoires, aucun développement de long terme n’est possible sans une aide de l’État qui vienne compenser certains handicaps, dont le principal est l’enclavement, qui empêche un territoire de communiquer correctement avec les autres, d’accueillir des innovations et de faire valoir ses atouts. Dans ce cadre, l’État doit mettre en place une politique d’implantation cohérente de ses services sur les territoires et, d’autre part, mettre à disposition des territoires le socle minimal de services leur permettant de se développer (Recommandations 13 à 19).

Au-delà de ce partenariat, les institutions locales jouent un rôle considérable en accueillant les projets utiles à leurs territoires et en les aidant à s’épanouir. Le territoire national fourmille de bonnes pratiques en la matière qui s’appuient généralement sur le quadriptyque suivant : inscrire la ruralité dans un projet de territoire cohérent ; nouer des alliances et articuler les territoires ; repenser et adapter l’offre de services aux habitants ; organiser l’ingénierie territoriale. L’élaboration de projets de territoire est un gage de cohérence de l’action publique locale, c’est aussi un outil puissant pour créer une dynamique locale. Évidente dans les territoires de projet (PETR, SCoT, PNR…), elle est tout aussi importante dans les intercommunalités.

Un autre gage de réussite pour les territoires ruraux et leurs collectivités réside dans leur capacité à nouer des alliances et à assurer des coopérations entre territoires (lire ici) Il s’agit d’obtenir une taille critique en termes de moyens, d’éviter des phénomènes de concurrence territoriale et d’interconnecter les territoires pour permettre plus de solidarité et créer des dynamiques communes. Collectivités et intercommunalités rurales ne peuvent se substituer aux entreprises ou à l’État mais elles peuvent contribuer, par leurs investissements, à créer les conditions favorables pour atteindre un objectif essentiel à leur développement : stabiliser, voire accroître leur population.

Par ailleurs, l’amélioration de l’offre de services est cruciale pour les habitants et les collectivités doivent pouvoir contribuer à leurs évolutions par la modernisation, sans dégradations et pour toutes les catégories d’usagers sans exception. La modernisation des services est une triple source de développement pour les territoires. Elle permet de stabiliser la population en l’encourageant à rester sur place. Elle constitue un soutien aux entreprises qui contribuent à mettre en place ces services. Elle permet à des entreprises de s’implanter dans les territoires ruraux grâce à la qualité des connexions de toute nature dont elles pourront bénéficier. Les principaux services dans lesquels les collectivités s’investissent pour redonner du souffle à leurs territoires sont ceux qui permettent de structurer et d’ouvrir ces territoires (transports, numérique…) et ceux qui permettent à la population de demeurer sur place ou de s’installer (enseignement, santé, commerces, culture, vie associative …).

Toutefois, à la base de tout projet de développement local figurent les capacités d’ingénierie territoriale. Celles-ci, souvent fragiles et mal réparties, doivent être renforcées et davantage coordonnées. (Recommandations 20 à 33).

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Évaluation des politiques publiques : la vision du sénateur du Gers exposée au Conseil d’Etat

Publié le 2 mars 2020

Le Conseil d’État est la plus haute juridiction administrative française. Il conseille aussi le Gouvernement, l’Assemblée nationale et le Sénat dans l’élaboration de la loi. Chaque année, sa section du “Rapport et des Etudes” approfondit un sujet d’enjeu national en donnant aux acteurs divers concernés la parole dans le cadre d’un cycle de conférences. Pour 2019-2020, c’est le thème de l’évaluation des politiques publiques qui a été choisi. Identifié par le Conseil d’Etat pour ses travaux législatifs de 2015 et 2018 traitant de ce sujet, le sénateur du Gers, Franck Montaugé, a été invité, vendredi 28 février, pour la conférence intitulée “Les acteurs de l’évaluation des politiques publiques”. Voici le texte intégral de son intervention:

M. le vice-président du Conseil d’Etat, M. le président de la Haute Autorité pour la Transparence de la Vie publique, M. le président du Conseil économique, social et environnemental, mesdames et messieurs,

La première fois que je suis venu au Conseil d’Etat, c’était le 20 juin dernier avec la commission des Affaires économiques. Je garde un souvenir très vif des échanges que nous, sénateurs, avons pu avoir avec les conseillers qui nous ont présenté leur travail. Et j’ai vécu un moment exceptionnel à l’écoute des échanges et délibérations que les conseillers d’État ont eu ce matin-là en assemblée générale à propos des projets de lois constitutionnel et organique que le gouvernement venait alors de soumettre pour avis. La rigueur intellectuelle, la clarté et même la pédagogie des expressions, et plus encore la liberté de ton que j’ai alors perçus m’ont conforté dans l’idée qui est la mienne, d’un Conseil d’Etat partie prenante si ce n’est clé de voûte de la République et de l’Etat de droit qui lui est consubstantiel. Je ne vous cacherai pas non plus que je suis friand de vos rapports d’études et je salue les travaux de la section que préside Mme de Boisdeffre. Alors merci, Monsieur le vice-président, de votre invitation à participer à cette table ronde.

C’est un grand honneur pour moi de pouvoir contribuer ce matin à la réflexion du Conseil d’État sur l’évaluation des politiques publiques. L’objectif de mon intervention est de vous faire partager le cheminement concret d’un sénateur, peut-être un peu présomptueux, qui s’est évertué à convaincre son institution de poser un autre regard, celui que pourrait avoir le citoyen, sur la fabrique, le suivi et l’évaluation des lois et des politiques publiques. Ma thèse, si tant est que ce mot convienne, est que le Parlement doit s’organiser et s’acculturer, monter en compétence pour assumer utilement, efficacement, la mission d’évaluation des politiques publiques que lui confie l’article 24 de la Constitution de la Ve République. Et qu’il doit le faire en s’ouvrant, en travaillant étroitement avec les spécialistes, les détenteurs de la technique et de l’expertise, la Cour des comptes et le Conseil économique, social et environnemental, comme le prévoit la Constitution de la Ve République, des organismes de l’État, l’Université, etc. et aussi, les destinataires des politiques publiques, les citoyens, la société civile, ses forces vives et ses représentations.

A ce stade, Je crois utile de dire ce que j’entends par politique publique et par évaluation. Les politiques publiques sont le lieu où des sociétés définissent leur rapport au monde et à elles-mêmes. Quant à l’évaluation, c’est l’Activité de rassemblement, d’analyse et d’interprétation de l’information concernant la mise en oeuvre et l’impact de mesures visant à agir sur une situation sociale, ainsi que la préparation de mesures nouvelles. Je rajoute que les politiques publiques et leur évaluation constituent un champ de savoir et de recherche à part entière. Et je remarque que cette science de l’État en action est aussi la branche la plus récente de la science politique.

Comme un nouvel arrivant se voit parfois demandé un rapport d’étonnement en arrivant dans une entreprise qu’il ne connaît pas, le récent sénateur que j’étais en 2015 a fait très vite le constat de deux choses :

  1. La faiblesse, l’insuffisance du PIB pour rendre compte de la notion de richesse.
  2. Une activité d’évaluation des politiques publiques réduite à sa portion congrue avec des signes qui ne trompent pas sur le fait que cette activité soit peu considérée: une discussion et un vote trop formel de la loi de règlement qui mobilise très peu de parlementaires; un exercice annuel et systématique au Sénat de suivi de la mise en oeuvre des lois mais peu d’évaluation des politiques publiques à proprement parler.

En 2015, à partir de l’interrogation menée en 2008 et 2009 sur la crise par la commission « Stieglitz-Sen-Fitoussi », des travaux législatifs ayant abouti à la loi Sas de 2015 sur les nouveaux indicateurs de richesse, et sur la base de nombreuses auditions d’économistes de sociologues de toutes écoles et de représentants de l’Etat, j’ai déposé deux propositions de lois. L’une ordinaire proposant la création d’un “Conseil parlementaire d’évaluation des politiques publiques et du bien-être” et la tenue d’une “conférence annuelle sur les inégalités”, l’autre, organique, visant à améliorer la qualité des études d’impact des projets de loi.

A propos des indicateurs et au-delà du caractère réducteur et partiel, non pas du PIB mais de l’usage et de l’interprétation qui en sont faits dans le champ public, je constate aujourd’hui la faible appétence des Gouvernements qui se succèdent à utiliser cette loi Sas, les indicateurs qu’elle prévoit ainsi que le rapport annuel qui les commente et les met en perspective. Il a fallu relancer pour obtenir le troisième rapport, la parution étant désormais décalée de fait à février, soit après l’examen de la loi de finances et de la loi de financement de la sécurité sociale. Personne en définitive n’y prête sur le fond l’attention qu’il mériterait, média, parlement et donc Gouvernement. Sans parler du citoyen.

Pour mémoire, les nouveaux indicateurs de richesse de la loi Sas sont :

  • le taux d’emploi,
  • l’effort de recherche,
  • l’endettement,
  • l’espérance de vie en bonne santé,
  • la satisfaction dans la vie,
  • les inégalités de revenus,
  • la pauvreté en condition de vie,
  • les sorties précoces du système scolaire,
  • l’empreinte carbone,
  • l’artificialisation des sols.

Pourtant il me semble que de nombreux systèmes d’indicateurs robustes, fiables, explicites et accessibles sont utilisables pour éclairer le débat public. En 2011, l’OCDE s’est dotée d’une démarche du même ordre, intitulée « L’initiative du vivre mieux », dont j’ai noté que le système permettait des pondérations de critères propres à la culture et aux enjeux politiques que se donnent différemment les États membres. Parmi les indicateurs :

  • emplois et salaires,
  • vie professionnelles-vie privée,
  • logement,
  • qualité de l’environnement,
  • état de santé,
  • éducation et compétence,
  • liens sociaux,
  • engagement civique et gouvernance,
  • sécurité personnelle,
  • bien-être subjectif
  • etc.

Celui de l’ONU avec les objectifs de développement durable* dont les indicateurs sont produits et actualisés par l’Insee, qui plus est à différents niveaux, du pays aux collectivités locales, les régions notamment. Dans les édito des troisième et quatrième rapports sur les nouveaux indicateurs de richesse, début 2018 et 2019, le Premier Ministre évoque aussi les 17 objectifs de développement durable du Programme de développement durable de l’ONU à l’horizon 2030 auxquels ont adhéré 193 États. Le Premier Ministre écrit à cette occasion, et je le cite: «Cette dynamique […] a un sens politique profond. […] Il s?agit de savoir ce sur quoi nous fondons collectivement notre appréciation de ce que l’on entend par croissance, développement, bien-être ou progrès.» Et il indique que “les principales réformes engagées par le Gouvernement seront évaluées à l?aune de ces indicateurs”.

*Les ODD de l’ONU

  • Ni pauvreté ni faim,
  • santé et bien-être,
  • éducation,
  • égalité Hommes/Femmes,
  • eau propre et assainissement,
  • énergie propre et abordable,
  • travail décent et croissance économique,
  • industrie innovation et infrastructures,
  • inégalités réduites,
  • villes et communautés durables,
  • consommation et production responsables,
  • lutte contre le changement climatique,
  • vie aquatique,
  • vie terrestre,
  • paix justice et institutions efficaces,
  • partenariats pour la réalisation des objectifs.

Les nouveaux indicateurs de richesse de la loi Sas ne sont pas incompatibles avec ces systèmes internationaux mais je pense qu’il y a un intérêt fort à ce que des comparaisons puissent être faites entre pays et en tendance. Et que le lien puisse être fait aussi avec les engagements internationaux de la France, je pense en disant cela aux engagements souscrits à la Conférence de Paris, dans le cadre de la Cop 21. Je rajoute à cela et ce n’est pas neutre, que pour moi le choix des indicateurs est un acte politique par nature. L’adhésion aux démarches d’évaluation nécessitera que cet aspect soit pris en compte. C’est indéniablement un point de complexité que le débat doit nous permettre d’appréhender. En vertu de quoi je pense aussi qu’il faut accorder une attention particulière aux organismes producteurs d’indicateurs et d’évaluations. C’est cette position que j’ai traduite dans la proposition de loi visant à améliorer les études d’impact, en prévoyant que la liste des organismes, publics ou privés, amenés à produire des études d’impacts soient choisis dans une liste définie par décret pris en Conseil d’État selon des critères d’indépendance et de pluralisme.

Alors pourquoi envisager de créer un Conseil parlementaire d’évaluation des politiques publiques et du bien-être ? Comment le Parlement, dans sa forme bicamérale, de manière si possible objective à défaut d’être consensuelle au plan politique, peut-il produire une information utile pour alimenter le débat public et la pensée politique ? On comprend en participant à l'”Office parlementaire d’évaluation des choix scientifiques et technologiques” – j’ai eu cette chance–, que le champ du savoir scientifique et technique permet plus facilement cette production objective mais même ce domaine de connaissances peut donner lieu, en fonction des sujets, à des partis pris, des options qui relèvent du subjectif. La méthode scientifique ne garantit pas le savoir absolu et ce qui est reconnu comme vrai un jour ne l’est pas forcément pour toujours. A partir de là, je crois qu’il faut se lancer et donner au Conseil parlementaire d’évaluation des politiques publiques et du bien-être les moyens d’une approche la plus scientifique possible, en ayant conscience que dans les domaines de l’économie, de la sociologie, des sciences humaines, le débat public peut et doit se nourrir d’approches différentes parce que fondées sur des présupposés de valeurs différentes, et c’est aussi le lieu et la matière de la politique. La diversité de pensée, d’approche, dans le respect des positions des uns et des autres, doit être possible. Nous devons nous y efforcer en tant que citoyens. Le conseil scientifique que mon texte a prévu d’adjoindre au Conseil parlementaire d’évaluation des politiques publiques et du bien-être a vocation à refléter cette diversité. Tout en restant dans le sujet, j’ouvre une parenthèse. L’école française d’économie hétérodoxe mériterait la création d’une section au sein du conseil national des universités. Et la question d’une nouvelle section de ce type au CNRS est tout aussi pertinente.

Deux mots sur la notion de bien-être. Elle n’est pas anodine dans l’intitulé et elle a vocation à poser la question du sens, de la signification aussi de l’action publique, du point de vue de la société et de ses différentes composantes. Lors de la conférence inaugurale de vos travaux, j’étais intervenu pour dire que la notion de politique publique méritait d’être interrogée, qu’elle n’allait peut-être pas de soi et que l’objet politique publique donnait lieu à un savoir universitaire très riche digne du plus grand intérêt. Je crois d’ailleurs avoir cité à cette occasion les travaux de Pierre Muller qui m’ont éclairé le sujet. Pierre Muller a introduit la distinction entre « global et sectoriel » dans le champ des politiques publiques. Si je l’ai bien compris, ce point plaide pour un croisement, une prise en compte des effets des lois dans les champs publics qu’elles affectent, qu’elles impactent comme on dit.

Pour que les évaluations soient utiles, je ne crois donc pas qu’on puisse les mener, en tout cas exclusivement, dans le cadre des commissions permanentes des chambres parlementaires. Par extension, je pense qu’une structure parlementaire commune du type de celle que j’ai proposée serait plus appropriée aux objectifs recherchés. Après discussion, la majorité sénatoriale a renvoyé mon texte en commission des lois. Il a été repris partiellement pour in fine introduire dans le règlement du Sénat un dispositif de suivi de la mise en oeuvre des lois confié en commission aux rapporteurs initiaux des textes ou à des rapporteurs nommés à cet effet. Dans cet esprit, la commission des Affaires économiques du Sénat vient de procéder à une évaluation de la loi Egalim. Il s’en est suivi le vote d’une proposition de loi visant à adapter cette loi.

Notre société a changé, le rapport des citoyens aux institutions, à ceux qui les représentent a beaucoup évolué aussi, pouvant aller jusqu’à des éruptions comme avec le mouvement des gilets jaunes. Une évaluation de la traduction et de la perception des politiques publiques par nos concitoyens qui se sont mobilisés à cette occasion aurait-elle été de nature à éviter ce qui s’est passé ? Quels enseignements peut-on tirer de cet événement politique d’ampleur pour le sujet qui nous intéresse ce matin ? Je ne vais pas répondre à ces questions mais je crois qu’une approche globale et sectorielle, structurée et menée en continuité dans le temps, doit être développée pour appréhender les dimensions économique, sociale, environnementale et culturelle de ce fait politique. L’ensemble des acteurs de la société doit y contribuer si ce n’est y participer. Et je ne vois pas a priori comme une menace l’expérience que constitue la Convention citoyenne pour le climat si la coopération avec le Parlement et les corps intermédiaires est recherchée et instituée. Le moment venu, il faudra analyser ce qu’a produit cette convention et les conditions de cette production. Le pouvoir d’agir sur la société s’accroît-il par la pluralité des acteurs ? Question pour notre temps qu’abordait Hannah Arendt dans sa « Condition de l’homme moderne ».

En guise de conclusion, l’article 24 de la Constitution de la Ve République donne explicitement au Parlement la mission d’évaluer les politiques publiques. Les missions d’enquêtes, les rapports d’information y concourent, les études d’impact abordent le sujet mais aucune démarche ou organisation, propre à chaque chambre ou qui leur serait commune, ne me semble aujourd’hui à la hauteur des enjeux, d’une part. Et disant cela, je salue la démarche du « printemps de l’évaluation » que développe l’Assemblée nationale dans le cadre de son règlement et que vous a présenté ici M. Barrot. D’autre part, si tous les acteurs de la société sont concernés de manière générale au titre de la citoyenneté, ils le sont aussi en tant qu’acteurs et sujets de politiques publiques sectorielles, spécifiques à tel ou tel champ de la société.

Nous sommes, nous législateurs élus, particulièrement impliqués dans nos missions, mais nous ne pouvons pas travailler en vase clos, fut-ce avec des conseillers de très haut niveau, comme c’est le cas au Sénat. Au-delà de l’appréciation personnelle que chacun d’entre nous porte sur son expérience parlementaire, la question de l’efficacité, si ce n’est de l’efficience, de notre action collective et de notre contribution aux évolutions de la société française est posée dans le débat public. Réformer les institutions doit aussi répondre à cette nécessité mais pour ce qui est de l’évaluation des politiques publiques la question de fond, pour moi, est de savoir comment nous nous y prenons pour engager le Parlement effectivement, concrètement, dans cette voie. Pour moi, la réponse est peut-être plus encore organisationnelle qu’institutionnelle. Ma conviction est qu’en travaillant en lien avec les institutions spécialisées et le monde académique compétent sur ces sujets, en nous appuyant également sur les compétences et l’expertise remarquable des administrations de nos deux chambres, nous pourrions, nous parlementaires, beaucoup mieux remplir le rôle que nous a donné le Constituant en matière de contrôle et d’évaluation. L’ensemble des acteurs de la démocratie républicaine française doit aussi pouvoir y prendre part et pour cela, la participation et le dialogue doivent être au fondement de nos propositions.

Francis Ponge disait: «La meilleure façon de servir la République c’est de donner force et tenue au langage.» Merci au Conseil d’État, à son vice-président M. Lasserre et à tous ses membres, de contribuer par ces échanges producteurs de langage et de sens, à la restauration de la confiance si nécessaire à nos démocraties.

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