Intervenant dans le débat « Quelle politique énergétique pour la France? Quelle place pour EDF?« qui se tenait mercredi 11 décembre au Sénat, le sénateur du Gers Franck Montaugé s’est adressé à la ministre de la Transition écologique et solidaire Elisabeth Borne.
« EDF a trois défis majeurs à relever, dit-il :
- le défi de la transition énergétique dans le cadre de la stratégie nationale bas carbone et du développement des énergies renouvelables
- le défi financier posé par sa dette, les besoins de financement des investissements, le maintien injustifié de l’ARENH
- le défi de la souveraineté énergétique nationale, l’État et les collectivités territoriales devant garder la totale maîtrise de la gestion de ce bien premier et stratégique qu’est l’électricité.
Pour répondre à ces objectifs dans l’intérêt général de la Nation, deux conceptions s’opposent :
- la vôtre, celle du Gouvernement aujourd’hui, exprimée dès mars 2016 à l’Assemblée nationale par le Président de la République qui était alors ministre de l’Economie, celle de la scission des composantes du groupe, du démantèlement, c’est le mot qu’il a employé lui-même, à l’instar de ce qui s’est passé et se passe encore aujourd’hui pour Engie ex-GDF.
- et l’autre conception, celle de ceux qui pensent comme moi que l’intégration actuelle du Groupe EDF est un atout majeur et qu’elle doit être confortée. Non par dogme mais par souci de l’efficacité à long terme pour une industrie de réseau par nature très capitalistique, dans l’intérêt premier des clients et… des collectivités locales qui doutent et craignent la remise en question du régime des concessions et des principes qui ont fait preuve de leur efficience comme celui de la péréquation tarifaire. »
« Dans ce contexte flou, anxiogène, attisé en particulier par l’hypothèse que vous avez exprimée d’un mix électrique à 100% de sources renouvelables, pouvez-vous nous préciser, Mme la Ministre, l’épure et la justification par le Gouvernement du projet Hercule? », interroge le sénateur (1).
« Il ne faudrait pas inverser les rôles, a répondu la ministre. Ça n’est pas le gouvernement qui propose un projet de réorganisation d’EDF, le gouvernement pose un cadre sur la politique énergétique et il souhaite qu’EDF trouve la meilleure organisation dans le cadre d’une entreprise intégrée pour relever ces défis de la transition énergétique qui sont au coeur de la transition écologique que nous devons mener. Le gouvernement, dit-elle, est extrêmement attaché au rôle central d’EDF dans ce défi. C’est bien pour ça que dans le cadre de la programmation pluriannuelle de l’énergie il est demandé à EDF de poursuivre l’exploitation du parc nucléaire existant jusqu’à cinquante ans, et d’autre part de participer à un développement massif des énergies renouvelables. Et je pense qu’EDF répond bien à ces différents défis. Notre préoccupation c’est qu’EDF ait bien les moyens de participer à ces investissements sans précédent pour la transition énergétique. L’organisation proposée doit permettre de répondre à tous ces défis », dit-elle.
« J’ai écouté votre réponse avec attention, mais le président d’EDF Jean-Bernard Lévy a tenu des propos en audition sensiblement différents des vôtres, a répliqué Franck Montaugé. Je voudrais profiter de l’occasion pour souligner l’enjeu majeur que constitue pour nous la maîtrise totale des réseaux. À votre écoute, on ne sait toujours pas comment Enedis peut rester totalement publique en étant intégré dans l’entité EDF verte dont le capital sera ou serait privatisé. Je pense que le regroupement d’Enedis et RTE dans une entité réseau 100% publique serait pertinente. L’énergie, à titre de bien commun, devrait être soustraite à toute logique de spéculation financière », dit-il en conclusion.
1-Le projet Hercule est un projet de refonte d’EDF prévoyant notamment la séparation des activités du groupe dans un EDF Bleu comprenant le nucléaire, les barrages et les lignes à haute tension RTE, et un EDF Vert regroupant le gestion des sources renouvelables, les services, le commerce et Enédis. Une partie du capital d’EDF Vert serait mise en bourse.